Stockage de l’eau Quand le préfet de Région retourne sa veste
Après avoir torpillé le lac de Caussade, l’ex-préfet de l’Occitanie, désormais à la tête de l’Auvergne-Rhône-Alpes, somme aujourd’hui ses fonctionnaires d’identifier cent projets de retenues collinaires. Un virage à 180° et une inégalité de traitement que dénonce la chambre d’agriculture du Lot-et-Garonne.
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« Pendant que le préfet Mailhos écrit “Faites des lacs”, nous sommes convoqués au tribunal pour le lac de Caussade », s’agace Serge Bousquet-Cassagne, le président de la chambre d’agriculture du Lot-et-Garonne. À l’origine de son courroux, un courrier adressé par le préfet de la Région Auvergne-Rhône-Alpes à ses fonctionnaires, les sommant d’identifier rapidement cent projets prioritaires de retenues collinaires dans la Région (télécharger la lettre du préfet). Or jusqu’en octobre 2018, le préfet Mailhos officiait en Région Occitanie et il était nettement mois enthousiaste à l’idée de stocker l’eau pour l’irrigation. Il est même le torpilleur principal du projet du lac de Caussade, porté par la chambre d’agriculture du Lot-et-Garonne, selon son président.
« Le Chef de l’État compte sur nous »
« On nous a mis des bâtons dans les roues avec les projets de territoire, qui n’étaient qu’une façon d’enterrer en grande pompe un dossier de retenue d’eau. Et voilà que le préfet demande à ses fonctionnaires de trouver une centaine de lacs en se basant sur un document-protocole datant de 2011. Bien entendu, il s’affranchit ici totalement des projets de territoire », fustige Serge Bousquet-Cassagne. À la fin de la lettre de Pascal Mailhos, une phrase manuscrite : « Le chef de l’État compte sur nous », confirme que le préfet de la Région a retourné sa veste sur l’injonction d’Emmanuel Macron.
Un effet « Sommet de l’élevage »
Selon Serge Bousquet-Cassagne, Pascal Mailhos serait le seul préfet de Région à avoir communiqué ce type d’instruction pour développer des retenues collinaires en ne se situant plus dans le cadre de projets de territoire. Un empressement qui a pour origine un entretien entre le haut-fonctionnaire et le président de la République au dernier Sommet de l’élevage. « L’accueil des éleveurs y a été très mitigé pour Macron, qui a entendu les revendications sur le manque d’eau et a ordonné au préfet Mailhos d’agir rapidement », précise le président de la chambre d’agriculture.
Un précédent pour Caussade
Serge Bousquet-Cassagne a adressé un courrier à la préfète du Lot-et-Garonne en rappelant les règles d’égalité de traitement des citoyens. « Dans ces conditions, nous devons obtenir l’autorisation administrative pour le lac de Caussade, insiste l’agriculteur. Les services de la préfecture doivent encore vérifier la solidité de la digue, ce qui ne posera aucun problème car nous avons tout surdimensionné. Il y a quand même une volonté politique de nous ralentir en demandant une deuxième étude environnementale, alors que la première a déjà coûté 200 000 euros. »
En attendant une réponse de la préfète, les agriculteurs du Lot-et-Garonne concernés se réjouissent de voir le lac se remplir peu à peu et s’annoncent prêts, le moment venu, à ouvrir les vannes pour réalimenter le ruisseau dans lequel ils viendront pomper. « Il n’y a que deux solutions : soit Emmanuel Macron désavoue le préfet Mailhos, soit ils font des lacs en Auvergne-Rhône-Alpes, ce qui validera de fait le nôtre », constate Serge Bousquet-Cassagne.
Corinne Le GallPour accéder à l'ensembles nos offres :